Une approche rigoureuse

En réponse aux défis climatiques et aux exigences en matière d'efficacité énergétique, l’industrie de la construction doit prendre au sérieux la transition vers des matériaux biosourcés comme piste de solution pour réduire notre empreinte carbone collective. Parmi ces solutions, les isolants en fibre de bois se démarquent par leurs propriétés techniques intéressantes, notamment en matière de performance thermique, de régulation hygrométrique et d’une faible empreinte carbone. Cependant, leur intégration dans le contexte canadien demeure un défi nécessitant des ajustements règlementaires et des adaptations techniques.

L’agrandissement de l’École des Cerisiers à Maskinongé, conçu en bois massif, vise à démontrer le potentiel des isolants en fibre de bois dans l’enveloppe d’un bâtiment scolaire. Ce projet de 2384 m² combine innovation et durabilité en intégrant des matériaux biosourcés dans sa structure et son enveloppe.

Première étape : étude des performances et propriétés techniques des composants de l’enveloppe

L’utilisation des isolants en fibre de bois n’est pas une pratique innovante en soi, car les isolants sont produits à partir des retailles de l’industrie du bois d’œuvre. Cependant, l’utilisation de ces isolants en fibre de bois à cette ampleur de projet au Canada en constitue le caractère innovant.

Les isolants en fibre de bois sont fabriqués par deux procédés : humide et à sec. Le procédé humide mélange les fibres avec de l’eau et parfois avec des agents de liaison, puis le tout est compressé et séché mécaniquement. Le procédé à sec pulvérise les fibres avec de la paraffine, suivi d’un séchage à l'air chaud et d’un traitement à la résine polyuréthane. Certains procédés à sec vont aussi nécessiter le durcissement de l’agent de liaison par exposition à un mélange d'air et de vapeur d'eau.

À la suite de nos recherches, il nous semblait que les panneaux d’isolant fabriqués par un procédé à sec seraient plus adaptés. De plus, les épaisseurs disponibles des panneaux fabriqués à sec nous permettraient d’atteindre nos cibles de performance thermique sans laminer plusieurs épaisseurs de panneaux. Malgré les nombreux manufacturiers de produit d’isolation biosourcé au Québec, aucun d’entre eux à ce jour n’utilise une fabrication sèche des isolants.

Gestion de l’humidité et point de rosée

L’utilisation d’un isolant biosourcé à base de bois dans l’enveloppe du bâtiment implique une grande prudence en ce qui traite la gestion de la vapeur d’eau et de la condensation : les différentiels de température au Québec peuvent déplacer la localisation du point de rosée selon la saison. La localisation du pare-vapeur peut donc être bonne pour une partie de l’année seulement, mais favoriser la condensation au cœur de l’isolant pour une autre partie de l’année. Une migration, une rétention, ou un point de rosée dans une composante biosourcée pourrait conduire à une croissance fongique ou à une perte de performance des composantes.

Afin d’assurer une bonne étanchéité à l’air et réduire les risques de condensation dans l’assemblage de l’enveloppe, il a fallu développer un assemblage impliquant deux membranes, pare-intempérie pour protéger les composants en bois contre le vent et les sources d’eau de l’extérieur, et pare-vapeur pour protéger contre de l’humidité provenant de l’intérieur du bâtiment. Avec une ossature de bois et une charpente en bois massif, l’assemblage de l’enveloppe doit avoir des couches de contrôle de l’air, de la vapeur et de la chaleur perméable à la diffusion de la vapeur pour empêcher la putréfaction. Ceci est d’autant plus important quand les cavités des murs sont remplies d’isolant en matelas.

Certains isolants, comme la laine minérale, la fibre de verre et la fibre de bois, permettent cette diffusion de la vapeur, contrairement aux mousses plastiques et au polystyrène. Le panneau Multitherm et l’isolant en matelas Thermoflex de Gutex ont une perméabilité similaire aux produits en laine de roche. Cependant, il est difficile de comparer les données, car les produits Gutex ne sont pas encore testés selon la norme ASTM E96 « Standard Test Methods for Water Vapor Transmission of Materials ».

Les membranes intelligentes, comme le pare-vapeur INTELLO X de Pro Clima, ajustent leur perméance en fonction des variations d’humidité. En hiver, elles deviennent plus résistantes à la diffusion pour limiter la pénétration de l’humidité intérieure, tandis qu’en été, elles favorisent son évacuation vers l’intérieur du bâtiment, assurant ainsi un séchage efficace. De son côté, la membrane pare-intempérie SOLITEX MENTO 1000 de Pro Clima a une haute perméabilité à la vapeur permettant l’humidité dans l’assemblage de s’évacuer vers l’extérieur.

Résistance au feu des isolants en fibre de bois

L’un des défis majeurs a été la question des normes et certifications. Actuellement, la majorité des produits en fibre de bois sont fabriqués en Europe et ne sont pas entièrement certifiés selon les normes et les méthodes d’essai nord-américaines.

À ce jour, aucun isolant en fibre de bois sur le marché ne semble pour l’instant réussir avec succès les tests d’incombustibilité CAN/ULC S114. Cependant, le panneau Multithem de Gutex a été testé pour l’indice de propagation de la flamme et de la fumée selon ASTM E84 et CAN/ULC-S-102. Pour la norme ASTM E84, le panneau est classifié de classe B avec un indice de propagation de la flamme (FSI) de 65 et un indice de dégagement des fumées (SDI).

Aucun test d'incombustibilité ou sur l’indice de propagation de la flamme et de la fumée conforme aux normes nord-américaines ne semble avoir été réalisé pour l'isolant en matelas Thermoflex de Gutex. Cela implique que son utilisation dans des murs incombustibles ou dans des murs ayant une résistance au feu pourrait être compromise étant donné que la composition des façades doit être conforme au tableau 3.2.3.7 « Exigences minimales de construction pour les façades de rayonnement ».

Implantée au cœur de la municipalité de Maskinongé, un village au caractère agricole prononcé, l'école primaire Des Cerisiers dessert une communauté d'environ 2 300 habitants, caractérisée par sa solidarité et son engagement. Le projet d’agrandissement vise à métamorphoser cette école existante pour accueillir tous les élèves du village sous un même toit. Ce projet constitue l'unique projet d’agrandissement issu du concours de design Lab-École. Dans cette initiative unique, et en étroite collaboration avec l’équipe école locale, le programme a été élaboré pour refléter précisément les besoins et les valeurs spécifiques de la région.

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Photographe : David Boyer

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Photographe : Maxime Brouillet

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Photographe : Maxime Brouillet

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Photographe : Taillefer + Paquet + Leclerc Architectes consortium

Photographe : Taillefer + Paquet + Leclerc Architectes consortium

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Auteur : Elaine Tat et Thomas Gauvin-Brodeur

Comment assurer le respect des règles d’approvisionnement du Secrétariat du Conseil du Trésor pour un projet public?

Les aspects administratifs relatifs aux approvisionnements et à l'appel d'offres public nous ont amenés à réviser nos sections de devis de l’enveloppe. Les produits acceptables doivent fonctionner comme un système global plutôt que comme des produits individuels. Nous avons fait appel à des fournisseurs pour obtenir des systèmes d’enveloppe intégrant les isolants biosourcés et les autres composants compatibles. Nous avons évalué les risques d’approvisionnement et budgétaires et les contraintes techniques.

Comment documenter l’utilisation de l’isolant en fibre de bois et son impact dans la performance de l’enveloppe?

Pour notre équipe et les parties prenantes, il était essentiel d’obtenir des données empiriques afin d’évaluer la performance réelle du système d’enveloppe intégrant l’isolant en fibre de bois dans un climat canadien. Nous avons élaboré dès le début du projet un plan de travail rigoureux, visant à assurer une compréhension approfondie du système proposé lors du développement des plans et devis et à faciliter un transfert efficace des connaissances sur le chantier lors de l’installation du système d’enveloppe.

Afin d’approfondir cette analyse et d’obtenir des résultats précis, nous avons décidé de collaborer avec un consultant spécialisé en enveloppe du bâtiment. Ce dernier nous accompagne dans la documentation de la performance de l’enveloppe à travers une série de tests in situ après la réalisation du projet. Ces tests nous permettront de mesurer concrètement l’impact de l’isolant en fibre de bois sur l’efficacité énergétique et la durabilité du bâtiment.

Pourquoi un client institutionnel prendrait-il le risque d’utiliser des isolants en fibre de bois dans l’enveloppe d’un projet public?

Analyse théorique de l’empreinte carbone

La fibre de bois est fabriquée à partir de ressources renouvelables et affiche une empreinte carbone nettement inférieure à ces équivalents, soit la laine de roche dans cette étude. Son cycle de vie, allant de l’extraction des matières premières à la fin de vie du produit, contribue à la réduction globale des émissions de gaz à effet de serre des bâtiments.

En collaboration avec nos partenaires de Cecobois et Stantec, nous avons mené une étude sur l'outil GESTIMAT, développé par Cecobois, afin de quantifier la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) liées à la fabrication des matériaux de structure du projet Lab-École Maskinongé, en le comparant à un scénario de référence.

Les modélisations théoriques sur GESTIMAT du projet construit et le scénario de référence incluaient l’ossature des murs et des cloisons, ainsi que l’isolant dans les murs extérieurs. Nous avons exclu de la quantification les éléments non discriminants entre le projet construit et le scénario de référence. Les fondations, l’école existante et tous les revêtements de finition, tant extérieurs qu’intérieurs, n’ont pas été pris en compte. Par exemple, les parements extérieurs, les panneaux de support, les revêtements de sol, les revêtements muraux et le type de plafond.

La fabrication des matériaux du projet réalisé génère des émissions de GES d’environ 137 345 kg éq. CO2, soit 76 kg éq. CO2/m² de superficie totale de plancher. En comparaison, celle du scénario de référence atteint 397 679 kg éq. CO2, soit 220 kg éq. CO2/m². Ainsi, le projet réalisé permet une réduction significative des émissions de GES, avec 260 334 kg éq. CO2 en moins, soit une diminution de 144 kg éq. CO2/m².

Tests in situ

Dès les premières étapes du projet, l’objectif a toujours été d’évaluer le potentiel des isolants en fibre de bois, non seulement sur le plan théorique, mais surtout en mesurant leur performance réelle après installation. Dans cette optique, deux tests d’infiltrométrie, ainsi que des analyses par thermographie et test de fumée, ont été réalisés pour identifier et qualifier les fuites d’air du bâtiment.

À la suite de la thermographie infrarouge, des faiblesses ont été découvertes dans l’enveloppe et présentées à l’entrepreneur. Le rapport souligne que les faiblesses d’étanchéité dans le système pare-air se situent principalement au périmètre des portes, des murs-rideaux et des fenêtres. Ces observations indiquent que les infiltrations ne résultent pas d’une mauvaise installation des membranes ou des isolants, mais plutôt de l’installation des ouvertures.

Des travaux additionnels ont été réalisés (scellement, jonctions, réparation des seuils de portes, etc.) pour adresser la majorité des éléments relevés et améliorer la performance globale de l’enveloppe. Certains éléments relevés lors de cette thermographie sont cependant restés tels quels en raison de l’avancement du chantier : les faiblesses rencontrées n’étaient pas d’une gravité suffisante pour justifier des travaux correctifs intrusifs dans l’enveloppe, risquant de nuire à sa performance globale.

Afin de valider les faiblesses de l’enveloppe mises en évidence lors de la thermographie et de confirmer la performance de l’étanchéité à l’air, notre équipe s’est mobilisée une seconde fois ce printemps pour réaliser des tests de fumée dans les locaux où une déperdition de chaleur avait été observée.

Le dernier volet de l’évaluation de l’enveloppe repose sur le monitorage. Des équipements de mesure, installés à des endroits stratégiques du bâtiment, nous permettront de suivre l’évolution des données quantitatives du projet sur une période de deux ans.

Mise en œuvre au chantier

Résultats

Lors de la réalisation au chantier, un contrôle de la construction a été effectué par les professionnels et le consultant spécialisé en enveloppe du bâtiment. De façon similaire aux contrôles sur place par les professionnels, des visites in situ des manufacturiers ou des agents manufacturiers ont été exigées dans les sections de devis des matériaux à l’étude.

Une fois que l’ossature des murs extérieurs était montée au chantier, nous avons organisé une visite de chantier pour démontrer l’installation des composants selon les recommandations du manufacturier accompagné du consultant spécialisé et le représentant du fournisseur des isolants. Suivant les démonstrations d’installation, les professionnels ont transmis des informations complémentaires pour préciser l’installation des membranes.

La conception des compositions d’enveloppe intégrant des isolants en fibre de bois s’est réalisée en 3 étapes : (1) l’évaluation théorique des performances et propriétés techniques des composants de l’enveloppe du bâtiment, (2) l’analyse comparative des compositions avec un scénario de référence et (3) l’élaboration des détails critiques de l’enveloppe.

La mise en œuvre au chantier s’est réalisée avec la vérification de contrôle qualité de l’installation au chantier et les essais in situ de l’enveloppe du bâtiment. Une thermographie de l’enveloppe a été complétée en février 2024, le test de fumée a eu lieu le 3 mars 2025 et le monitorage de l’enveloppe se fera pendant une période de deux ans.

Troisième étape : élaboration des détails critiques d’enveloppe

Suivant l’analyse des fiches techniques des produits choisis et des exemples de détails typiques, nous avons évalué les détails critiques de l’enveloppe en collaboration avec le consultant spécialisé en enveloppe du bâtiment.

Les détails typiques ciblés dans l’étude sont :

  • Jonction du mur extérieur avec la fondation (en coupe)

  • Jonction du mur extérieur au pourtour d’une fenêtre (en coupe et en plan)

  • Jonction du mur extérieur avec un mur-rideau (en coupe et en plan)

  • Jonction du mur extérieur avec les différentes compositions de la toiture

  • Jonction du mur extérieur avec le soffite et la marquise

  • Détail de la toiture ventilée (en pente) pour réduire les ponts thermiques

Deuxième étape : analyse comparative avec un scénario de référence

Les panneaux en fibre de bois sont une alternative intéressante aux isolants de mousse plastique ou même à l’isolant en laine minérale. Ces panneaux rigides offrent des propriétés similaires aux produits de références. La rigidité de ces panneaux permet également le retrait d’un panneau de support (gypse ou contreplaqué), puisqu’une membrane pare-air/pare-intempérie peut être installée directement dessus.

Dans nos analyses préliminaires, nous avons choisi des paramètres comparables pour le système de référence (sans isolant biosourcé) et le système proposé (avec isolant biosourcé). La perméabilité à la vapeur d'eau, la performance thermique ainsi que les méthodes de fixation et d'installation des isolants ont été évaluées dans chacun des systèmes pour garantir une comparaison équitable.

Dans notre proposition de projet, nous avons évalué 3 types d’isolant en fibre de bois afin de faire une bonne comparaison avec le scénario de référence. Dans nos projets institutionnels habituels, trois types d’isolant se trouve dans le bâtiment : (1) isolant rigide pour toiture, (2) isolant semi-rigide derrière l’écran pare-pluie et (3) isolant en matelas entre les colombages des murs et cloisons. Afin d’extraire le plus de données possibles dans cette étude de cas, nous avons évalué les équivalents de ces trois types d’isolant en fibre de bois. Cependant, nous n’avons pas retenu l’isolant rigide pour la toiture pour des raisons budgétaires et techniques.

Perspective pour l’industrie de la construction

Grâce au projet d'agrandissement de l'école des Cerisiers, les résultats des essais in situ nous permettront d'enrichir et de contribuer à la base de données sur la performance des isolants en fibre de bois dans l’enveloppe du bâtiment, spécifiquement adaptée à notre climat au Québec.

En complément du rapport sur la quantification des émissions GES des matériaux de construction, cette étude met en avant les options d’isolants bas carbone, qui permettent de réduire significativement l’empreinte environnementale des bâtiments tout en améliorant leur efficacité énergétique. Ces alternatives aux matériaux synthétiques offrent un potentiel considérable pour la transition vers une construction plus durable et résiliente.

Ce projet s'inscrit dans une démarche plus large visant à faire émerger et développer l'industrie des isolants biosourcés au Québec et au Canada. Actuellement, les isolants en fibre de bois utilisés dans le projet ont dû être importés d’Europe, faute d’équivalence sur le marché canadien ou québécois. Cette situation souligne l'importance de diversifier et structurer une filière locale, notamment en valorisant les résidus de l’industrie de la transformation du bois. En encourageant le développement et la production d’isolants biosourcés sur le territoire québécois, il devient possible de stimuler un marché en pleine évolution, de réduire la dépendance aux matériaux importés et de favoriser une économie circulaire et locale.

Finalement, cette étude illustre un projet où l'innovation et la durabilité sont au cœur des valeurs fondamentales. Il est essentiel de souligner que, même dans les projets institutionnels publics, la durabilité n'exclut en rien l'innovation. De plus, les produits biosourcés ne sont ni plus complexes à intégrer ni moins performants que les systèmes synthétiques couramment utilisés dans l'industrie.

Architectes : Leclerc architectes + Lucie Paquet + Paulette Taillefer

Ingénieurs : Stantec

Architectes de paysage : Mousse Architecture de Paysage

Consultant spécialisé en enveloppe du bâtiment : Envelop3

Entrepreneur général : Therrien Entrepreneur Général

Client : Centre de services scolaire du Chemin-du-Roy

Défis dans un contexte de projet public

Le Gouvernement du Québec a adopté en 2015 la Politique d’intégration du bois en construction afin d’encourager l’industrie à accroître l’utilisation du bois dans les bâtiments publics et ainsi favoriser le développement durable, soutenir l’économie locale et réduire l’empreinte carbone du secteur de la construction.

En tant qu’architectes, nous avons l’opportunité de contribuer à ces objectifs en intégrant des matériaux à base de bois dans l’enveloppe des bâtiments ainsi que dans leurs finis extérieurs et intérieurs. L’utilisation d’isolants en fibre de bois représente une innovation prometteuse qui a déjà suscité l’intérêt de plusieurs parties prenantes prêtes à collaborer.

Ce projet a bénéficié d’un soutien financier supplémentaire grâce à une subvention du Ministère des Ressources naturelles et des Forêts (MRNF) ainsi qu’à l’appui de la municipalité de Maskinongé, témoignant d’un engagement concret envers l’intégration accrue du bois dans la construction.

Un projet novateur au cœur d’une communauté engagée

Objectifs de cette étude de cas

L’objectif principal de cette initiative est d’évaluer la performance thermique et environnementale des isolants en fibre de bois par rapport aux solutions conventionnelles, tout en mettant en évidence les défis liés à leur intégration dans les pratiques de construction québécoises.

De plus, ce projet avait comme but de démontrer qu’à l’intérieur d’un même bâtiment, les multiples potentiels d’intégration des matériaux en bois dans un bâtiment public à vocation scolaire, ainsi que les avantages qui en sont retirés (réduction des GES, biophilie, mise en valeur de la main-d'œuvre locale, qualités des espaces d'apprentissage, etc.).

Nous espérons que l’École des Cerisiers servira d’exemple pour mettre en valeur les performances techniques de ces isolants, les difficultés rencontrées lors de leur mise en place, les solutions adoptées et les perspectives qu’ils offrent pour le secteur de la construction.

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Une approche rigoureuse

En réponse aux défis climatiques et aux exigences en matière d'efficacité énergétique, l’industrie de la construction doit prendre au sérieux la transition vers des matériaux biosourcés comme piste de solution pour réduire notre empreinte carbone collective. Parmi ces solutions, les isolants en fibre de bois se démarquent par leurs propriétés techniques intéressantes, notamment en matière de performance thermique, de régulation hygrométrique et d’une faible empreinte carbone. Cependant, leur intégration dans le contexte canadien demeure un défi nécessitant des ajustements règlementaires et des adaptations techniques.

L’agrandissement de l’École des Cerisiers à Maskinongé, conçu en bois massif, vise à démontrer le potentiel des isolants en fibre de bois dans l’enveloppe d’un bâtiment scolaire. Ce projet de 2384 m² combine innovation et durabilité en intégrant des matériaux biosourcés dans sa structure et son enveloppe.

Step 1: studying the performance and technical properties of the components of the building envelope

Using wood fibre insulation is not an innovative practice per se, as insulation is manufactured from offcuts from the timber industry. However, using wood fibre insulation in a project of this scale in Canada is innovative.

Two processes are used to manufacture wood fibre insulation: wet and dry. In the wet process, fibres are mixed with water and sometimes with a binder, the mix is mechanically compressed and dried. In the dry process, fibres are sprayed with paraffin, then dried using warm air and applied polyurethane resin. Some dry processes also require hardening of the binder through exposure to a mixture of air and water vapour.

Based on our research, it appears to us that insulation panels manufactured using a dry process are more suitable. In addition, the available range of thickness of panels manufactured using a dry process allows us to achieve our thermal performance targets without laminating several panel thicknesses. Despite the existence of many manufacturers of bio-based insulation products in Québec, none of them currently uses a dry process for insulation.

Managing humidity and dew point

Using wood-based and bio-based insulation in the building envelope requires extreme caution in managing water vapour and condensation: temperature differences in Québec may move the location of dew point according to the season. The location of the vapour barrier may consequently be effective only for part of the year, but encourage condensation within the insulation in the other part of the year. Migration, retention or dew point in a bio-based component may lead to fungal growth or loss of component performance.

To achieve effective airtightness and reduce condensation risks in the assembly of the building envelope, it was necessary to develop assembly involving two membranes, a weather barrier to protect wood components against wind and external water sources, and a vapour barrier to protect against humidity from inside the building. Given the timber frame and mass timber roof frame, the assembly of the building envelope needs air, vapour, and thermal control layers which are permeable to vapour diffusion to prevent putrefaction. This is all the more important when the wall cavities are filled with mattress insulation.

Some insulation, such as mineral wool, glass fibre and wood fibre, allow such vapour diffusion, unlike plastic foams and polystyrene. Multitherm panels and Gutex Thermoflex mattress insulation have similar permeability to rockwool products. However, it is difficult to compare data since Gutex products have not yet been tested under the ASTM E96 standard on “Standard Test Methods for Water Vapour Transmission of Materials”.

Intelligent membranes, such as Pro Clima Intello X vapour barrier, adjust permeability based on changes in humidity. In winter, they become more resistant to diffusion to limit humidity penetrating indoors, while in summer, they promote humidity evacuation towards the building interior, thus ensuring effective drying. Pro Clima Solitex Mento 1000 weather barrier membrane has high vapour permeability allowing humidity in the assembly to evacuate towards the exterior.

Fire resistance of wood fibre insulation

One of the major challenges was the issue of standards and certifications. At present, the majority of wood fibre products are manufactured in Europe and are not fully certified in compliance with North American standards and testing methods.

No wood fibre insulation currently on the market seems to successfully pass the CAN/ULC S114 non-combustibility tests. However, the Gutex Multitherm panel was tested for the flame spread index and smoke developed index in compliance with ASTM E84 and CAN/ULC-S-102. For the ASTM E84 standard, the panel was classified as class B with a flame spread index (FSI) of 65 and smoke developed index (SDI).

No non-combustibility testing or testing for the flame spread index and smoke developed index in compliance with North American standards appears to have been carried out on Gutex Thermoflex mattress insulation. This means that using such insulation in non-combustible walls or fire resistant walls may be compromised as the makeup of building faces must comply with Table 3.2.3.7 “Minimum Construction Requirements for Exposing Building Faces”.

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Photographe : David Boyer

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Photographe : Taillefer + Paquet + Leclerc Architectes consortium

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Photographe : David Boyer

La conception des compositions d’enveloppe intégrant des isolants en fibre de bois s’est réalisée en 3 étapes : (1) l’évaluation théorique des performances et propriétés techniques des composants de l’enveloppe du bâtiment, (2) l’analyse comparative des compositions avec un scénario de référence et (3) l’élaboration des détails critiques de l’enveloppe.

La mise en œuvre au chantier s’est réalisée avec la vérification de contrôle qualité de l’installation au chantier et les essais in situ de l’enveloppe du bâtiment. Une thermographie de l’enveloppe a été complétée en février 2024, le test de fumée a eu lieu le 3 mars 2025 et le monitorage de l’enveloppe se fera pendant une période de deux ans.

Perspective pour l’industrie de la construction

Grâce au projet d'agrandissement de l'école des Cerisiers, les résultats des essais in situ nous permettront d'enrichir et de contribuer à la base de données sur la performance des isolants en fibre de bois dans l’enveloppe du bâtiment, spécifiquement adaptée à notre climat au Québec.

En complément du rapport sur la quantification des émissions GES des matériaux de construction, cette étude met en avant les options d’isolants bas carbone, qui permettent de réduire significativement l’empreinte environnementale des bâtiments tout en améliorant leur efficacité énergétique. Ces alternatives aux matériaux synthétiques offrent un potentiel considérable pour la transition vers une construction plus durable et résiliente.

Ce projet s'inscrit dans une démarche plus large visant à faire émerger et développer l'industrie des isolants biosourcés au Québec et au Canada. Actuellement, les isolants en fibre de bois utilisés dans le projet ont dû être importés d’Europe, faute d’équivalence sur le marché canadien ou québécois. Cette situation souligne l'importance de diversifier et structurer une filière locale, notamment en valorisant les résidus de l’industrie de la transformation du bois. En encourageant le développement et la production d’isolants biosourcés sur le territoire québécois, il devient possible de stimuler un marché en pleine évolution, de réduire la dépendance aux matériaux importés et de favoriser une économie circulaire et locale.

Finalement, cette étude illustre un projet où l'innovation et la durabilité sont au cœur des valeurs fondamentales. Il est essentiel de souligner que, même dans les projets institutionnels publics, la durabilité n'exclut en rien l'innovation. De plus, les produits biosourcés ne sont ni plus complexes à intégrer ni moins performants que les systèmes synthétiques couramment utilisés dans l'industrie.

Architectes : Leclerc architectes + Lucie Paquet + Paulette Taillefer

Ingénieurs : Stantec

Architectes de paysage : Mousse Architecture de Paysage

Consultant spécialisé en enveloppe du bâtiment : Envelop3

Entrepreneur général : Therrien Entrepreneur Général

Client : Centre de services scolaire du Chemin-du-Roy

La fibre de bois est fabriquée à partir de ressources renouvelables et affiche une empreinte carbone nettement inférieure à ces équivalents, soit la laine de roche dans cette étude. Son cycle de vie, allant de l’extraction des matières premières à la fin de vie du produit, contribue à la réduction globale des émissions de gaz à effet de serre des bâtiments.

En collaboration avec nos partenaires de Cecobois et Stantec, nous avons mené une étude sur l'outil GESTIMAT, développé par Cecobois, afin de quantifier la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) liées à la fabrication des matériaux de structure du projet Lab-École Maskinongé, en le comparant à un scénario de référence.

Les modélisations théoriques sur GESTIMAT du projet construit et le scénario de référence incluaient l’ossature des murs et des cloisons, ainsi que l’isolant dans les murs extérieurs. Nous avons exclu de la quantification les éléments non discriminants entre le projet construit et le scénario de référence. Les fondations, l’école existante et tous les revêtements de finition, tant extérieurs qu’intérieurs, n’ont pas été pris en compte. Par exemple, les parements extérieurs, les panneaux de support, les revêtements de sol, les revêtements muraux et le type de plafond.

La fabrication des matériaux du projet réalisé génère des émissions de GES d’environ 137 345 kg éq. CO2, soit 76 kg éq. CO2/m² de superficie totale de plancher. En comparaison, celle du scénario de référence atteint 397 679 kg éq. CO2, soit 220 kg éq. CO2/m². Ainsi, le projet réalisé permet une réduction significative des émissions de GES, avec 260 334 kg éq. CO2 en moins, soit une diminution de 144 kg éq. CO2/m².

Analyse théorique de l’empreinte carbone

Lors de la réalisation au chantier, un contrôle de la construction a été effectué par les professionnels et le consultant spécialisé en enveloppe du bâtiment. De façon similaire aux contrôles sur place par les professionnels, des visites in situ des manufacturiers ou des agents manufacturiers ont été exigées dans les sections de devis des matériaux à l’étude.

Une fois que l’ossature des murs extérieurs était montée au chantier, nous avons organisé une visite de chantier pour démontrer l’installation des composants selon les recommandations du manufacturier accompagné du consultant spécialisé et le représentant du fournisseur des isolants. Suivant les démonstrations d’installation, les professionnels ont transmis des informations complémentaires pour préciser l’installation des membranes.

Mise en œuvre au chantier

Résultats

Dès les premières étapes du projet, l’objectif a toujours été d’évaluer le potentiel des isolants en fibre de bois, non seulement sur le plan théorique, mais surtout en mesurant leur performance réelle après installation. Dans cette optique, deux tests d’infiltrométrie, ainsi que des analyses par thermographie et test de fumée, ont été réalisés pour identifier et qualifier les fuites d’air du bâtiment.

À la suite de la thermographie infrarouge, des faiblesses ont été découvertes dans l’enveloppe et présentées à l’entrepreneur. Le rapport souligne que les faiblesses d’étanchéité dans le système pare-air se situent principalement au périmètre des portes, des murs-rideaux et des fenêtres. Ces observations indiquent que les infiltrations ne résultent pas d’une mauvaise installation des membranes ou des isolants, mais plutôt de l’installation des ouvertures.

Des travaux additionnels ont été réalisés (scellement, jonctions, réparation des seuils de portes, etc.) pour adresser la majorité des éléments relevés et améliorer la performance globale de l’enveloppe. Certains éléments relevés lors de cette thermographie sont cependant restés tels quels en raison de l’avancement du chantier : les faiblesses rencontrées n’étaient pas d’une gravité suffisante pour justifier des travaux correctifs intrusifs dans l’enveloppe, risquant de nuire à sa performance globale.

Afin de valider les faiblesses de l’enveloppe mises en évidence lors de la thermographie et de confirmer la performance de l’étanchéité à l’air, notre équipe s’est mobilisée une seconde fois ce printemps pour réaliser des tests de fumée dans les locaux où une déperdition de chaleur avait été observée.

Le dernier volet de l’évaluation de l’enveloppe repose sur le monitorage. Des équipements de mesure, installés à des endroits stratégiques du bâtiment, nous permettront de suivre l’évolution des données quantitatives du projet sur une période de deux ans.

Tests in situ

Step 3: working out the critical details of the building envelope

Based on the analysis of the data sheets for the selected products and examples of typical details, we assessed the critical details of the building envelope in collaboration with the consultant specializing in building envelopes.

The typical details covered by the study are:

  • Junction of the exterior wall with the foundation (sectional view)

  • Junction of the exterior wall with a window periphery (sectional view and plan view)

  • Junction of the exterior wall with a curtain wall (sectional view and plan view)

  • Junction of the exterior wall with the makeup of the roof

  • Junction of the exterior wall with the soffit and canopy

  • Details of the ventilated (sloped) roof to reduce thermal bridges

Step 2: comparative analysis with a reference scenario

Wood fibre panels are an interesting alternative to plastic foam insulation or even mineral wool insulation. These rigid panels have similar properties to reference products. The rigidity of these panels also allows a backing panel (in gypsum or plywood) to be removed since an air barrier/weather barrier membrane may be applied directly on them.

In our preliminary analysis, we selected comparable parameters for the reference system (excluding bio-based insulation) and the proposed system (including bio-based insulation). Water vapour permeability, thermal performance, and insulation fitting and installation methods were assessed in each of the systems to ensure a fair comparison.

In our proposed project, we assessed three types of wood fibre insulation to carry out an effective comparison with the reference scenario. In our normal institutional projects, three types of insulation are used in buildings: (1) rigid insulation for the roof, (2) semi-rigid insulation behind the rain screen and (3) mattress insulation between the wood studs in the walls and partitions. In order to extract as much data as possible in this case study, we assessed the equivalents of these three types of wood fibre insulation. However, we did not use rigid insulation for the roof due to budgetary and technical reasons.

Objectifs de cette étude de cas

L’objectif principal de cette initiative est d’évaluer la performance thermique et environnementale des isolants en fibre de bois par rapport aux solutions conventionnelles, tout en mettant en évidence les défis liés à leur intégration dans les pratiques de construction québécoises.

De plus, ce projet avait comme but de démontrer qu’à l’intérieur d’un même bâtiment, les multiples potentiels d’intégration des matériaux en bois dans un bâtiment public à vocation scolaire, ainsi que les avantages qui en sont retirés (réduction des GES, biophilie, mise en valeur de la main-d'œuvre locale, qualités des espaces d'apprentissage, etc.).

Nous espérons que l’École des Cerisiers servira d’exemple pour mettre en valeur les performances techniques de ces isolants, les difficultés rencontrées lors de leur mise en place, les solutions adoptées et les perspectives qu’ils offrent pour le secteur de la construction.

Implantée au cœur de la municipalité de Maskinongé, un village au caractère agricole prononcé, l'école primaire Des Cerisiers dessert une communauté d'environ 2 300 habitants, caractérisée par sa solidarité et son engagement. Le projet d’agrandissement vise à métamorphoser cette école existante pour accueillir tous les élèves du village sous un même toit. Ce projet constitue l'unique projet d’agrandissement issu du concours de design Lab-École. Dans cette initiative unique, et en étroite collaboration avec l’équipe école locale, le programme a été élaboré pour refléter précisément les besoins et les valeurs spécifiques de la région.

Un projet novateur au cœur d’une communauté engagée

Photographe : Maxime Brouillet

Auteur : Elaine Tat et Thomas Gauvin-Brodeur

Comment assurer le respect des règles d’approvisionnement du Secrétariat du Conseil du Trésor pour un projet public?

Le Gouvernement du Québec a adopté en 2015 la Politique d’intégration du bois en construction afin d’encourager l’industrie à accroître l’utilisation du bois dans les bâtiments publics et ainsi favoriser le développement durable, soutenir l’économie locale et réduire l’empreinte carbone du secteur de la construction.

En tant qu’architectes, nous avons l’opportunité de contribuer à ces objectifs en intégrant des matériaux à base de bois dans l’enveloppe des bâtiments ainsi que dans leurs finis extérieurs et intérieurs. L’utilisation d’isolants en fibre de bois représente une innovation prometteuse qui a déjà suscité l’intérêt de plusieurs parties prenantes prêtes à collaborer.

Ce projet a bénéficié d’un soutien financier supplémentaire grâce à une subvention du Ministère des Ressources naturelles et des Forêts (MRNF) ainsi qu’à l’appui de la municipalité de Maskinongé, témoignant d’un engagement concret envers l’intégration accrue du bois dans la construction.

Pourquoi un client institutionnel prendrait-il le risque d’utiliser des isolants en fibre de bois dans l’enveloppe d’un projet public?

Défis dans un contexte de projet public

Pour notre équipe et les parties prenantes, il était essentiel d’obtenir des données empiriques afin d’évaluer la performance réelle du système d’enveloppe intégrant l’isolant en fibre de bois dans un climat canadien. Nous avons élaboré dès le début du projet un plan de travail rigoureux, visant à assurer une compréhension approfondie du système proposé lors du développement des plans et devis et à faciliter un transfert efficace des connaissances sur le chantier lors de l’installation du système d’enveloppe.

Afin d’approfondir cette analyse et d’obtenir des résultats précis, nous avons décidé de collaborer avec un consultant spécialisé en enveloppe du bâtiment. Ce dernier nous accompagne dans la documentation de la performance de l’enveloppe à travers une série de tests in situ après la réalisation du projet. Ces tests nous permettront de mesurer concrètement l’impact de l’isolant en fibre de bois sur l’efficacité énergétique et la durabilité du bâtiment.

Comment documenter l’utilisation de l’isolant en fibre de bois et son impact dans la performance de l’enveloppe?

Les aspects administratifs relatifs aux approvisionnements et à l'appel d'offres public nous ont amenés à réviser nos sections de devis de l’enveloppe. Les produits acceptables doivent fonctionner comme un système global plutôt que comme des produits individuels. Nous avons fait appel à des fournisseurs pour obtenir des systèmes d’enveloppe intégrant les isolants biosourcés et les autres composants compatibles. Nous avons évalué les risques d’approvisionnement et budgétaires et les contraintes techniques.